samedi 23 janvier 2010

Valleyfield et son PADD-E / «Mais où vont donc tous ces chars?» ou l'automobilité


C’est ce que me clamait André G. en riant, alors que nous déambulions, heureux piétons que nous étions, sur l’avenue du Centenaire, il y a bien 25 ans. Puisque André nous a quittés, je reprends sa question, une question qui peut sembler naïve, mais que bien des urbanistes ont formulé : «Mais où vont donc tous ces chars?»

Comme le mentionne l'État des lieux du PADD-E : «La planification des réseaux routiers et des quartiers résidentiels a été faite en fonction de l'automobile. On vit aujourd'hui avec les conséquences majeures de ces choix.»

Eh oui ! Combien de conducteurs – et leurs trop rares passagers – entrent et sortent de la Ville aux heures de pointe ou autres heures? Où vont-ils? D’où viennent-ils? Dans quel but? Travail, loisir, visite médicale ou à un parent éloigné, scolarité, emplettes? Toujours est-il que je vois bien peu de gens marcher dans nos rues. Ils prennent la route plutôt que de marcher 20, 30 ou 40 minutes. À croire que les humains ont perdu leurs jambes lorsque l’automobile a été inventée... Mais, ils sont sans doute pressés, ils n’ont pas ou ne prennent pas le temps. À quoi cela tient-il?

Se seraient-ils « mal localisés »? À Montréal, j’ai toujours loué un appart à proximité d’une bouche de métro. Mais ici, il n’y a pas de métro. Alors, « ils prennent leur char »… Le litre d’essence a de nouveau franchi la barre du 1 $ le litre. Alors pourquoi les ménages ne déménagent-ils pas tout bonnement à proximité de leurs lieux de travail? Cela leur éviterait bien des pertes de temps et d'argent, non? Qu’attendent-ils? Que le litre d’essence soit à 2 $ ou 3 $ ?

Mais les planificateurs urbains ont créé des parcs industriels, des centres commerciaux et des centres-villes qui ont soufflé les habitations à prix abordables, bien souvent à plus de 3 kilomètres à la ronde ! S'éloignant du centre-ville de Montréal, on passe des hautes tours d'habitation aux condos en rangées compactées, puis aux sixplex, quadruplex, duplex et bungalows avec (ou sans) piscine creusée ou hors-terre. La densité urbaine diminue... Mais que l'on habite le centre-ville ou la lointaine banlieue, la garderie se retrouve trop souvent à 2 km, l'école secondaire à 3 km et le centre d'achats à 5 km du nid familial ! Quant au lieu de travail, il faut parfois rouler 60 km et plus pour y mettre les pieds... et en revenir. Toujours en se tapant les inévitables bouchons de circulation.

Ce n'est pas ce que l'on nomme «le développement urbain intégré» : c'est faire n'importe quoi ou ne rien faire, cédant son bon sens et son leadership aux «promoteurs». Ma solution? Planifier le développement urbain pour assurer les familles d'un toit à prix raisonnable et de lieux de services courants - et de travail - accessibles à moins de 30 minutes de marche rapide. Utopique? Sans aucun doute! Mais c'est cet objectif totalement irréalisable que l'on doit se donner afin d'améliorer progressivement, à petits pas, notre urbanité.

Illustrons. J'ai plus de cinquante ans et j'ai souvent marché plus de 40 minutes pour me rendre au boulot... Alors, des ados qui marchent de 20 à 30 minutes entre l'école et la maison, ça vous pose un problème? «Mais son école secondaire est à 10 km!» Eh bien, faudrait peut-être convertir ce bunker, cette usine d'assemblage du savoir cyniquement nommé «lieu de la vie étudiante» en «espaces commerciaux à louer» et construire deux ou trois ou quatre écoles où il lui serait agréable de se rendre, de socialiser et d'étudier... «Mais ça va coûter bien trop cher!» Moins cher que le décrochage scolaire, les piètres «compétences académiques et relationnelles», la mauvaise condition physique, l'obésité et le diabète juvéniles, etc.

Il nous faut concevoir, construire et habiter la ville en tant que ces bipèdes que nous sommes depuis plus de 7,5 millions d'années, en tant que ces piétons urbains que nous sommes depuis plus de 8,000 ans (avec Jarmo et Hassuna) et non comme les automobilistes que nous sommes depuis moins de 100 ans. Une cité où nous ne serions plus contraints à «l'automobilité»... ;-)

A+

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